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La petite fée des PPP
N° 235 - décembre 2004

La vente des pesticides a augmenté de 600 %
Frédéric Lacroix
Une étude menée par l’Institut national de santé publique du Québec a récemment confirmé ce dont on se doutait déjà : les enfants québécois vivant en milieu urbain ont dans leur corps des résidus de pesticides employés pour le contrôle des insectes nuisibles et des mauvaises herbes. Les études épidémiologiques indiquent que certains pesticides sont cancérigènes ou affectent le système nerveux ou le système endocrinien à forte dose.

Les résultats de l’étude ne surprennent pas grand monde (à part l’industrie chimique !). La vente de pesticides a augmenté de plus de 600 % dans les trente dernières années au Québec et d’autres études ont déjà établi que les enfants, sans parler des adultes, des dauphins, des bélugas et des ours polaires, sont contaminés par des pesticides partout sur la planète Terre.

L’étude divulgée par l’INSPQ est une grande première, car le Québec avait jusqu’à présent superbement ignoré le problème. Saluons-la donc mais mentionnons tout de suite ses limites.

Premièrement, les scientifiques n’ont pas pu identifier la source de la contamination. Épandages domestiques ou municipaux pour avoir une belle pelouse ou contamination par les résidus de pesticides présents dans les produits alimentaires ? La question reste ouverte. Deuxièmement, les scientifiques n’ont testé que deux classes de produits chimiques (les pesticides organophosphorés et les herbicides chlorophénoxys). Troisièmement, les enfants présents en milieu agricole n’ont pas été inclus. Or, comme les pesticides, herbicides, fongicides de tout acabit sont utilisés intensivement dans ces milieux, il y a tout lieu de croire que les enfants vivants sur des fermes sont encore plus exposés que ceux vivant en milieu urbain. Fermier, profession à risque ?

Or, une étude menée par le World Wildlife Fund (WWF) effectuée sur des familles en Grande-Bretagne et publiée en août révélait que les enfants étaient contaminés non seulement par des pesticides, mais par toutes sortes de produits utilisés par l’industrie moderne comme des retardeurs de flamme (dans les meubles et les tissus), des PCBs (interdits mais encore présents dans l’environnement), des phthlates (un additif du plastique), des anti-bactériens comme le triclosan (utilisés dans les produits de nettoyage domestique), bref, dans le sang des tout-petits circule un cocktail toxique composé de dizaines de produits chimiques différents.

Bien sûr, les concentrations retrouvées étaient assez faibles, mais voici que les doses élevées de certains produits sont connues pour causer le cancer, interférer avec le système immunitaire ou endocrinien, mais les effets à long terme de faibles doses ou de cocktails de produits sont tout simplement inconnus !

De plus, aucune information sur la nocivité d’un grand nombre de produits d’usage courant n’est disponible même pour les fortes doses (jusqu’à 30 000 produits selon les estimations) ! À forte ou à faible dose, nous n’avons donc aucune idée de l’effet de la majorité des produits chimiques qui se trouvent dans notre environnement. Une « lacune » alarmante que l’Union européenne essaie présentement de corriger avec le programme REACH (Enregistrement, Évaluation, Autorisation de produits chimiques), programme qui n’a pas encore force de loi et qui est fortement contesté par l’industrie qui affirme qu’il serait trop coûteux de tester systématiquement les produits.

Le Québec a prohibé en avril 2003 l’utilisation des pesticides « dangereux », c’est-à-dire reconnus pour être cancérigènes sur les espaces verts publics et municipaux. Ne reste plus qu’à réglementer les pesticides utilisés en milieu agricole…et les retardeurs de flammes, les phthlates, les anti-bactériens… et les quelques 30 000 autres produits que nous utilisons chaque jour sans avoir la moindre idée de leur toxicité!

Le Canada, comme d’habitude, est à la remorque des Américains, qui penchent plus du côté de l’industrie que du bien public (air connu) pour ce qui est du contrôle de la toxicité des produits chimiques industriels. Sans de vraies mesures de contrôle des produits chimiques industriels, les prévisions de la Société canadienne du cancer qui indiquent une augmentation de 70 % des nouveaux cas de cancer au cours des quinze prochaines années (il y a actuellement 145 000 nouveaux cas de cancer annuellement au Canada) se réalisera très probablement.

L’industrie continuera à empocher les profits et la société tout entière paiera non seulement le lourd coût des traitements, mais verra la vie d’une personne sur deux (selon les prévisions) être détruite par cette maladie.

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