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Les boys 3 1/2 N° 206 - février 2002 |
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Des méfaits de la gourmandise François Parenteau |
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Chez nous la gourmandise a bonne réputation Et porte la valeur d'un péché bien mignon On voit chez les gourmands une saine faim de vivre Et leur bel hédonisme est un exemple à suivre Mais, près de nous, ailleurs qu'en ce peuple cigale Existe une planète où partout se régalent Des fourmis égoïstes et pas du tout frugales Se goinfrant d'intérêts tout comme de capital Se protégeant derrière et l'offre et la demande Elles forment un club privé de reines bien gourmandes Et le butin des crimes que leur armée commet Elles le cachent dans un trou en formant des sommets Leurs méfaits nous rappellent que si la gourmandise N'est souvent chez les pauvres que folie exquise Chez les riches ignorants de toute satiété Elle n'est que gloutonnerie, morgue, rapacité Mais comment distinguer, où se trace la ligne Entre appétit joyeux et gloutonnerie maligne Entre tous ces bonheurs qui font prendre du bide Et la lourde inconscience des obèses morbides ? Voyons donc un exemple où une gourmandise Se trouva réprimée sans que personne ne dise Que c'était brimer là un droit fondamental Je vous parle bien sûr des repas cannibales… Ne faites pas semblant que vous êtes choqués Ne dit-on pas parfois « Elle est belle à croquer » ? J'avoue d'ailleurs moi-même devant certains corps nus M'imaginer souvent un singulier menu 0 Des mollets de danseuse bien grillés aux pruneaux De l'épaule de serveuse au chutney d'abricot Des fesses et des moules, à la diable, à la louche J'ai juste en y pensant déjà l'eau à la bouche Et je souhaite en secret que certaines amies Lèguent en mourant leur corps à la gastronomie Pardonnez-moi, c'est vrai, cette ogre fantaisie Ne nous éclaire en rien sur le thème choisi… Mais songez que les meurtres des mangeurs d'humains Avaient au moins ceci d'économiqu'ment sain 0 Le vainqueur magnanime, en mangeant son prochain, Faisait qu'aucun des deux, après coup, n'avait faim… Or si la pensée seule de plats anthropophages Vous bloque l'estomac et coince l'œsophage C'est que vous comprenez que même votre appétit Ne saurait tolérer qu'un autre n'eut pâti En ça la gourmandise est comme la liberté Elle finit où commence la faim de l'affamé Au-d'là de cette limite, c'est de la gloutonnerie Et l'Amérique jadis toutes de muscles et d'esprit Est clairement devenue une nation gastrique D'obèses écrasants, d'outremangeurs sadiques D'ailleurs à ces gourmands qui pensent tout acheter Appréciez l'ironie - le monde est un marché… Partout ailleurs au monde où pousse un peu d'espoir L'Amérique se l'arrache pour poser ses mangeoires Et livre à son bétail les plus beaux territoires Ou encore, assoiffée, pour siphonner l'or noir En des pays fragiles et titubant encore Elle perce pour ses pailles et les âmes et les corps Voulant tout ingérer, elle fait de l'ingérence Et notre continent devient l'incontinence Quand leur appétit va, tout va et on voit bien Que leur faim justifie leurs énormes moyens Devant tant de grosseur et grotesque et grossière Peut-on mêm' s'étonner que certains suicidaires Aient envie de vengeance et cherchent au plus tôt À couper dans ce gras, même à coups d'exacto ? Sans faire l'apologie de ces sombres intégristes Comprenons seulement ce qui fait qu'ils existent S'ils pèchent par la fureur, qu'ils meurent donc tous brûlés On est toujours puni par où l'on a péché À cet égard, amis, le réel ironise Et nous ramène enfin à la dite gourmandise Où l'Occident entier américanisé Par George W. Bush se trouve représenté Or qu'est-il arrivé à ce puissant junior Pendant que tout là bas, ses boys luttaient encore Et qu'on l'eut cru astreint à travailler Sinon avec sa tête du moins d'arrache-pied ? Monsieur le président regardait la télé (Un bon match de football) sans doute un peu paqueté Sous l'effet de quelques blondes gazéifiées Et, mangeant des bretzels, gourmand, sans se méfier… Mais c'était sans compter sur un des ces bretzels Sans doute sympathisant des Talibans rebelles Qui, attentant aux jours du simiesque George Est venu se coincer quelque part dans sa gorge Manquant d'air au cerveau - c'est ce qu'a dit la Science Le Président tomba - deux secondes d'inconscience Il fallut ce bretzel pour révéler le fait Que cette grave inconscience ne le quitte jamais Et qu'importe après tout qu'il fut droit ou tordu À ce pretzel héros, tous les honneurs sont dus. Il rappelle que l'on peut - et que Bush se le dise - Périr d'être inconscient de trop de gourmandise |
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